NOTES JEAN GARCIN 20/21 POUR MÉMOIRE DU

NOTES ATELIERS COLLÈGE JEAN GARCIN

Décembre 2020 - mars 2021

(ISLE/SORGUE)

 Ces notes, en vrac, ont été prises dans le cadre du mémoire que je prépare dans le cadre du DU ANIMATION D'ATELIERS DE PHILOSOPHIE AVEC LES ENFANTS ET LES ADOLESCENTS, à l'Inspé de Nantes. Elles sont une trace des mes analyses de pratique. Le sujet que j'ai décidé d 'explorer est : Quel équilibre pour l'animateur entre suivre ses objectifs pédagogiques et suivre les discussions là où elles mènent? 

 

17/12

- faire un ou plusieurs graphiques représentant le tempo des séances à partir des audios.

 

18/12

-  reprendre en début de séance 3 un bilan des points forts/points faibles et du questionnaire des ressentis. Établir règles de vie « de base » : faire une carte mentale sur A3 par groupe à afficher à la séance 3. Partir des étapes 4/5/6 de la séance 2 pour ouvrir la séance 1.
> ouverture, développement, fermeture sont les 3 temps indispensables qui structurent l’atelier et permet de structurer la pensée, voir les apprentissages (penser à la structure des récits depuis la nuit des temps. Toujours le même, il offre un tempo « naturel » que chaque être humain reconnaît et dans lequel il peut s’installer pour ouvrir son esprit en toute tranquillité. Il sait qu’il peut aller explorer, même si le terrain semble inconnu, la structure est connue. Au-delà du rassurement que cela procure, une part de nous adhère de manière quasiment physiologique à ce tempo, à cette structure. On « re-connaît » un rythme universel, biologique, naturel, musical. Rythmer le temps d’une séance de cette manière, ce n’est pas « obliger » chacun à entrer dans un moule, c’est au contraire apporter une colonne vertébrale au groupe, afin que chacun puisse déployer ses ailes, son identité, sa singularité, certain d’être bien arrimé à ce mât intérieur.

 

- établir les moments-clés dans les ateliers où le temps devient un problème :

            - séance 1 : pas eu le temps de faire le bilan pour établir les règles. Récit trop long ? Débuts de séance où on prend le temps, puis il se rétrécit au fur et à mesure de la séance.

            -séance 2 : trop de temps pour le récit ? Début de séance qui s’étire jusqu’au moment où on sent que le temps se rétrécit… Pas eu le temps de partager le questionnaire-bilan en binôme ni en groupe. Oublié de récupérer les bilans pour en faire la synthèse. Bilans des points forts et faibles : groupe 1 assez court, groupe 2 n’en finit pas de creuser… Emmanuel me fait plusieurs fois des signes que l’heure tourne, me propose même d’agencer différement de façon à ne pas perdre de temps (bilans+cahiers en même temps et synthèse CRP en fin de séance : très efficace !). Un sentiment diffus de ne pas être à la hauteur. De ne pas maîtriser le temps, ni gérer de manière compétente le déroulé de la séance. Sentiment diffus de ne pas bien connaître la structure, de ne pas savoir où je vais, de me laisser emporter au grè du vent…

 

Notes autour de la récurrence des ateliers :

Si j’imagine qu’un enseignant ou un animateur anime très souvent des ateliers, je me dis qu’il doit assez rapidement acquérir l’expérience suffisante pour savoir gérer la structure, en maîtrisant bien le rythme de la séance. Mais est-ce forcément le cas ? Le PFH qui est à la base de notre métier n’apporte t-il pas une part d’inconnu, d’inmaîtrisable ? Et n’est-ce pas cette part qui est à favoriser dans un groupe ? Soyons bien clair : il ne s’agit pas de laisser les choses aller à vau-l’eau, mais tout en restant le capitaine du bateau, savoir donner du mou pour que l’équipage ait toute sa part à faire. Il me semble que la question du temps est pour une bonne part la question de la posture de l’animateur, ou plus précisément, sa vision, son « étoile polaire » comme avait dit …… pendant le parcours SEVE. Pas un but à atteindre, mais une direction à suivre.

Ces compétences sont bien sûr développées par des ateliers réguliers et nombreux. Mais peuvent-elles se développer si l’intention de départ n’y est pas ? SI la vision n’existe pas ? L’animateur serait à ce titre un créateur, un chef d’orchestre, un metteur en scène, un artiste qui façonne, sculpte, ordonne et laisse vivre la matière qui se présente sous ses doigts. Au théâtre, on dit que l’acteur est à la fois marrionnette et marrionnettiste. Le participant à un atelier de philosophie pourrait-il être envisagé sous ce même angle ? Il se dépose dans le groupe et dans les mains de l’animateur, tout en étant créateur de sa part de l’œuvre.

Concernant le rôle de l’animateur, il me semble qu’on trouve là une des 10 CPS, à savoir « savoir prendre des décisions » : à chaque instant de la séance, jauger et peser la direction à suivre. Imaginons un labyrinthe : l‘animateur serait le guide qui décide à chaque embranchement de la direction à suivre. La gestion du temps a t-elle à voir avec le développement de cette compétence ?

 

Depuis quelques temps, je réfléchis autour de la notion d’improvisation. Elle me semble fondamentale dans la posture de l’animateur. Mais aujourd’hui, me questionnant sur le temps, je peux commencer à affiner la définition que j’avais de cette notion : l’improvisation n’est pas le « n’importe quoi », le « feeling » subjectif d’un individu et la liberté totale et sans contrainte, le talent libéré du joug du cadre, mais une capacité à sculpter le temps et l’espace, le langage et l’émotionnel. Le metteur en scène possède une habileté à façonner la matière-humain née de l’acte créateur (théâtral ou dans une CRP).

 

Liens inattendus !

Je me rappelle quand j’ai commencé à créer mes 1ères séquences pédagogiques au théâtre. Je savais où j’allais. Cela stimulait le tempo de la séance. J’avais un but. Toute la tension résidait dans le délicat va et vient entre souplesse et intention forte.

Ne pas croire qu’une notion ou une question suffise à structurer une séance. Avoir une intention pédagogique, éducative, met la séance à un haut niveau d’exigence. La hauteur à laquelle nous mettrons notre niveau d’exigence témoigne du potentiel que nous accordons aux enfants. Ces réflexions ont-elles un lien avec la gestion du temps ?

 

Isabelle Peloux en début de formation « Pédagogie de la coopération » aux Amanins – octobre 2019 : « il y a un programme prévu pour ces 5 jours. Comme je suis bavarde, on ne le suivra pas à la lettre mais d’expérience, je sais qu’on verra tous les points prévus »

 

20/12 Sur la confiance dans le processus (MF Daniel p 208/209, in Autour de Mathew Lipman)

L’animateur ne doit pas seulement avoir confiance dans le processus mais aussi dans sa capacité à dérouler le processus en actions concrètes. Et c’est là où le bât blesse souvent ; Quand considère t-on qu’on est suffisamment expérimenté ? Connaît-on suffisamment les rouages des processus de pensée pour les observer quand ils apparaissent « entre les lignes » chez les enfants, entre les mots, masqués par un langage imprécis.

Question de la légitimité de l’animateur ? L’enseignant a t-il cette question lui aussi ?

Cela demanderait-il des analyses de verbatims réguliers, des échanges de pratiques pour se familiariser au décodage des habiletés de pensée ? Sur quels critères se baser ? (cf les 4 pensées MF Daniel ou les critères de ML)

 

P235 « … Autour de ML »

Quand on pose une question, on ouvre une boîte de Pandore. On ne peut pas savoir jusqu’où ça va nous mener ; Creuser avec précision - ne pas lâcher l’os à ronger – suggère des choix d’animation. Quel temps on va accorder à ce filon qu’on vient de mettre à jour ? Et si on « postpone », s’y engager vraiment !

> légitimer nos choix d’animation, assumer la subjectivité de nos ateliers, avoir conscience du processus global (graine plantée-terreau-arrosage-temps-arrosage-lumière-d’autres jardiniers qui prennent soin-nécessité-humilité-…)

 

Dans l’expression « Faire tout ce qu’on peut », ne pas s’arrêter aux 2 premiers mots. En fait, les 3 mots suivants sont plus importants. La remplacer par « faire ce qu’on peut »

 

Faire son maximum/être exigeant/avoir un haut degré d’exigence/rêver haut/toujours plus haut/se brûler les ailes/oublier le chemin/se perdre en chemin

 

21/12 Sur la gestion du temps au collège Jean Garcin

La collaboration avec Emmanuel Ronin favorise l’analyse de ma pratique, ce qui permet réajustements et affinements, de manière très réactive. Pourrait-on imaginer des critères essentiels à la posture de l’enseignant non animateur pendant un atelier ?

Est-ce qu’on fait « avec ce qu’on a » ? « au petit bonheur la chance ? », ou bien est-ce qu’on propose un cadre « enseignant et animateur » qui potentialiserait les effets de la CRP chez les élèves ?

 

22/12 Questions :

- est-ce qu’un enseignant a ce même sentiment de ne pas avoir assez de temps ? en collège ? en lycée ?

- Que faire de la question « comment faire un gâteau ? » ?

- Que faire du mot « intelligent » inscrit dans les points forts ? (jeudi 17/12)

 

23/12 Analyse de mes pratiques de préparation de séquences pédagogiques

Le programme créé en amont pour Jean Garcin est à la fois très précis, « fini » et en même temps, il est un point de départ, un canevas à partir duquel créer. Une matière brute en même temps que complète.  Le tout est de le savoir et de le garder à l’esprit tout au long des rencontres pour ne pas bloquer le processus.

 

Image du jardinier

Le jardinier vient dans son carré de jardin. Il a son matériel, ses graines, son eau. Il est habillé pour ce travail et prêt à l’action. Il n’a pas besoin de beaucoup de temps. Il a besoin d’un certain temps pour creuser les sillons, poser les graines, les recouvrir et les arroser. Ensuite, il a fini et peut aller se reposer. Il estime le temps qu’il lui faudra pour semer telle quantité de graines. Entre 2 semis, il ne commence pas à récolter ses tomates, à bêcher une autre partie du terrain. Non, il a décidé aujourd’hui qu’il sèmerait sur un certain nombre de sillons et il s’y tient.

Jusqu’où tient cette image dans le cas d’un animateur de CRP ?

Ici, le temps de l’improvisation n’existe pas. Celui de l’adaptation, oui, car il peut tomber sur des cailloux, une roche, qu’il va falloir déplacer avant de continuer. Cela peut prendre un certain temps, mais ensuite, il reprend son sillon. L’improvisation serait nécessaire si tout à coup, un coup de vent faisait s’envoler ses graines. Et encore…
Quelle est la différence entre adaptation et improvisation ?

L’adaptation entre en jeu dans la capacité d’improviser. Ces termes ne sont pas synonimes et pourtant, il m’est difficile de les distinguer précisément.

S’adapter comme improviser recquièrent de la créativité, une capacité d’être présent à ce qui se présente à nous. Mais s’adapter semble être un mouvement vers l’intérieur alors qu’improviser va vers l’extérieur. Improviser comprend une notion de créativité, d’invention plus nette. S’adapter ne recquiert pas d’apporter quelque chose de nouveau mais seulement de faire avec.

 

Un animateur a t-il besoin d’avoir des compétences d’improvisation ou seulement d’adaptation ? Et qu’est-ce que cette distinction engendre ?

J’ai mon programme, ma séquence pédagogique. Je vais la suivre car j’ai confiance dans la solidité de son processus. Je sais que des variations de tempo peuvent survenir car je ne sais pas comment les groupes vont réagir. Mais je peux décider que je veux mener cet atelier là où il me paraît avoir du sens. À ce moment-là, je fais le deuil de la surprise que pourrait occasionner la direction inattendue prise par les échanges.

Je peux aussi envisager que ces deux stratégies cohabitent sur une séquence de plusieurs séances.

Je décide alors qu’à telle séance, je donnerai comme cadre quelque chose comme : « aujourd’hui, c’est vous qui dirigez la discussion. Nous allons expérimenter un processus dans lequel vous gérez les échanges et moi, je suis observatrice ». Cela me permettrait de noter les différences. De prendre du recul vis à vis de ce que je connais déjà du groupe. Un peu à la manière dont Maria Montessori suggérait aux futurs éducateurs d’observer les enfants d’abord, avant d’entrer en interaction avec eux.

Cette capacité de « jouer » avec le tempo d’une séquence nous ramène à l’image du chef d’orchestre ou du monteur d’un film. Ce qui est requis, c’est une vision de l’ensemble de la structure. Se décentrer de la séance pour être confiant dans l’architecture du projet global. Encore faut-il avoir un projet global. Donc, une vision, une intention.

Ceci demande à la fois confiance et structuration, rationnalisation du projet. Professionnalisation ?

Dimension éducative ? Dimension d’apprentissage? Dimension d’enseignement ?

 

N’allons pas trop loin et n’ouvrons pas trop de portes à la fois !

 

Si l’on se recentre sur la gestion du temps, que peut-on en dire à ce stade ? 

- un animateur doit savoir gérer le temps d’une séance.

- un animateur doit savoir s’adapter à l’imprévu, à l’impensé.

- l’expérience doit être considérée comme une richesse sur laquelle il peut s’appuyer, mais non se reposer. L’étonnement face aux échanges dans le groupe reste fondamentale pour favoriser l’apprentissage par le mimétisme. L’esprit du débutant doit être recherché comme une attitude majeure : « tout connaître puis tout oublier pour redécouvrir le monde à chaque fois »

- un animateur doit avoir une vision claire et structurée du projet dans lequel il se trouve.

- un animateur doit être conscient des limites de ses actions.

- un animateur doit connaître les raisons qui lui ont fait choisir ce rôle et cette activité, ou en tout cas, doit continuer au fil du temps d’en chercher les raisons.

- un animateur doit avoir une exigence à la hauteur du potentiel d’apprentissage qu’il accorde aux enfants.

 

Les 9 attitudes de la Pleine Conscience

http://www.mindfulness-paris.fr/2016/10/13/neuf-attitudes-de-pleine-conscience/

- Lâcher prise

- Acceptation / laisser être

- Confiance

- non-jugement

- esprit du débutant

- authenticité

- patience

- gratitude

- générosité

 

 

04/01/21 - Premières notes après séances 3

- la question du temps me rattrape par tous les bouts : j’arrive à 8h sans avoir le temps de préparer l’espace comme je l’avais prévu (perdu mes clefs), je me laisse déborder par la séquence 1 du G1. Comme je suis speed, je ne prends pas le temps de me poser et de « prendre la température » du groupe. Je navigue à vue et en eaux troubles ! Je m’emmèle les pinceaux sur la séquence 2 et certains témoignent qu’ils sont perdus… LEn fin de séance, on n’a pas le temps de prendre les cahiers philo. Séance très désagréable en ce qui me concerne. Emmanuel et Mélanie sont très soutenants, me proposent de raccourcir certains moments, ne semblent pas trop déçus (ou ne le montrent pas !).

- Avec le G2, je rectifie le tir : raccourcir la séquence 1. Être plus claire sur les objectifs de l’activité. Modifier la manière d’amener la séquence 2 (partir de la citation et souligner peu à peu les habiletés qui surgissent, sans les présenter au départ : trop fastidieux et pas simple à imaginer). Essai-erreur-ajustement!

- Emmanuel me témoigne de l’importance qu’il accorde à faire des points entre nous une semaine sur deux : nous avons 1 heure de battement entre 2 groupes, 1 lundi sur 2. Le luxe !!

- Emmanuel est un collaborateur très précieux ! Il gère le temps et est attentif aux oublis dûs à ma précipation : penser à éteindre la bougie au moment opportun (fin de cercle).

- Un autre aspect important du tempo d’une série d’atelier réside dans sa continuité ou sa discontinuité. Là, les vacances de noël sont passées entre la séance 2 et la 3. On est lundi, jour de la rentrée et il est 8h ! Dans ce type de contexte, la séance doit être absolument plaisante, légère, à l’écoute des ambiances de chaque groupe.

- Mélanie et Emmanuel insistent délicatement sur le bon souvenir qu’ils ont des pratiques de l’attention en début de séance, l’année dernière. Ils souhaitent que je les propose à nouveau, pour voir, car ils ont l’impression que ça peut aider les groupes à démarrer. J’entends et j’enregistre, après avoir résisté ces derniers temps à inclure ces temps dans mon planning déjà bien chargé…

- L’expérience du G1 permet de faire avancer la séance du G2. Il semble qu’il n’y ait pas d’autre moyen de progresser que de tester et apprendre de ses erreurs.

- Emmanuel me souligne qu’on a fait du français (sur le fond car les sujets reviennent et sur la forme avec les habiletés) et de la philo ! Je suis ravie de cette transmission inattendue qui lui donnera peut-être des idées pour ses cours J

 

Notes groupe 2

Ambiance éteinte ce matin de rentrée 2021. Certains semblent être là à contrecoeur...

Tentative de réveiller l'ambiance en demandant aux élèves de m'aider sur certaines tâches (lire, afficher, écrire la citation,...). Mais écrire la citation est long et laborieux. Je me dis qu'il vaudrait mieux donner le texte écrit sur une feuille à l'élève, qu'il puisse l'écrire tranquillement au tableau pendant que le reste du groupe est occupé à autre chose.

Entre les séances des 2 groupes, Mélanie (documentaliste) et Emmanuel (prof français) m'aident à affiner et rythmer différemment les activités. Leurs retours me sont précieux et donnés avec énormément de bienveillance, et toujours une grande confiance.

En réécoutant les échanges, je m'aperçois que je ne suis pas très au clair avec certaines consignes. Les détails me viennent en court de route mais du coup, je parle beaucoup. Certaines fois comme ce matin, j'ai la sensation de "patiner" et de ne pas maîtriser ma route. Comme un guide qui se trompe de chemin et hésite aux intersections. On se voit faire mais on n'a pas vraiment de prise sur le résultat. Comme un acteur qui sent qu'il n'est pas "dedans", l'animateur peut se sentir "à côté" et avoir l'impression de ramer toute la séance... Dans ce cas-ci, je sais que c'est l'effet retour de vacances, lundi matin, 8h combiné à mon arrivée à 8h 02 alors que tout le monde est déjà en cercle. Impossible de retrouver mes clés de voiture avant de partir !!! De l'importance de se préparer en amont, à tout niveau, car le timing d’une animation d'atelier a beaucoup à voir avec un spectacle. C'est ici et maintenant  que tout se passe. Il faut être prêt pour donner le meilleur de soi-même dans ces 50 mn. Les enseignants n'ont pas ce souci...

 

Mercredi 6 janvier

Mail envoyé à Emmanuel R., professeur de français :

Emmanuel,

Après notre dernière séance, je me suis d’abord demandée si les élèves auraient besoin que je retrace le parcours entier afin qu’ils aient une vision d’ensemble plus claire et sachent dans quelle direction on va…

Ce qui m’a freiné jusqu’à présent, c’est la peur de les décourager devant la longue liste de séances :)) 

Finalement, je me dis qu'au moment d’entamer la création des récits, ce sera le bon moment de faire un bilan d’étape, du genre: vous avez passé plusieurs séances à découvrir et pratiquer la philosophie. À partir de maintenant, avec Emmanuel et Mélanie, nous allons vous accompagner à créer collectivement un ensemble de récits personnels sur un thème qui sera déterminé par vous. Ou quelque chose dans ce genre… 

Dans le même ordre d’idée, je me suis demandée s’il ne faudrait pas prendre le temps - comme je l’ai annoncé pendant la séance - de préciser la règle de confidentialité proposée par Mélanie et également de redéfinir le traitement  philosophique d’une question. Pour mémoire, je te rappelle la question de Martin à la première séance: "comment faire un gâteau? » Si tu te rappelles, Martin a fait remarquer que cette question concerne tous les humains, il n’y a pas qu’une seule réponse et elle est existentielle car elle concerne notre alimentation! 

Mais en t’écrivant, je me dis que le mieux serait de faire confiance au processus global et à la fin de nos 8 premières séances, on pourra toujours leur demander s’ils pensent encore que cette question est philosophique et sinon, ce qu’il faudrait pour qu’elle le soit? J’ai organisé ces 15 séances, pensant évolution des apprentissages, expérimentations, m’accrochant à mes idées, à mon programme… et du coup, je ne sais plus ce qui serait judicieux!

Une petite voix me dit que nous devrions élucider les problématiques soulevées en atelier, mais une autre me dit qu’on ne peut pas bifurquer à chaque événement imprévu et que je dois garder le cap, quitte à laisser certaines zones dans l’ombre, du moins provisoirement... Je réfléchis en même temps que je t’écris et je réalise que mon questionnement vient surtout du fait que j’annonce systématiquement « on en reparlera à un autre moment » et puis rien ne vient. Ce manque de cohérence me gêne dans ma posture d’animatrice (: 

Merci de me donner ton avis si tu peux! 

De mon côté, je vais être attentive à:

1) soit « résoudre »  le problème quand il survient

2) soit annoncer qu’on laisse la question en suspens et qu’elle sera peut-être résolue aux cours des prochaines séances. On pourrait même noter tous les points « litigieux » sur une feuille spéciale et y revenir en bilan final? L’idée me plaît :)

 

 

Jeudi 7 janvier

Les raisons liées à ma personne qui font que je suis presque toujours débordée par le temps en atelier :

- mon impatience à voir les résultats de mes propositions

- ma difficulté à prioriser ce qui est essentiel à transmettre, à faire expérimenter aux élèves. J’ai l’impression que ce point est crucial. Car à part les années d’expériences, comment sait-on ce qui est essentiel pour développer des compétences et de nouveaux paradigmes (croyances, pensées) chez un être humain ?

- dans la même veine, je vois que je focalise sur des détails et que je n’arrive pas aisement à avoir une vue d’ensemble. J’ai déjà nommé que la difficulté venait du manque du vue d’ensemble sur une série d’ateliers. Où veut-on aller ? Par quelles étapes veut-on faire passer les participants ? encore une fois, qu’est-ce qui est important ?

- il y a une dichotomie forte entre tenir le cap qu’on s’est fixé pour assurer un voyage serein et rassurant aux participants et faire avec ce qui se présente, ce qui est essentiel pour que l’atelier soit vivant et pas rigide.

 

Vendredi 8 janvier

Extraits d’une conversation téléphonique avec Emmanuel Ronin, professeur de français :

Suite à mon mail du 6 janvier, voici les décisions prises :

- on enlève à mon grand regret le dilemme du tramway. La séance 6 devient la séance sur Antigone et son dilemme moral. En amorce de la séance, je demanderai : connaissez-vous des exemples de dilemmes moraux ? dans votre vie, dans vos lectures, dans des films ou des séries ?

- en séance 7, on revient sur les « points litigieux » , notamment, qu’est-ce qui fait qu’une question est philosophique ?

Voici des témoignages d’Emmanuel concernant nos pratiques :

- le tempo et les variations d’activités lui plaisent beaucoup. Il trouve que ça empêche les jeunes de « s’installer dans une routine ».

- Il témoigne que nos échanges de pratiques lui sont bénéfiques pour ses cours. C’est tellement stimulant !

- « ce qui est dur, c’est de renoncer ! » me dit Emmanuel. Je réalise que les enseignants peuvent avoir le même « dilemme » quant au contenu de leurs séances.

 

Mercredi 13 janvier

« l’accélération de nos temporalités entraîne une pensée empêchée »

Hartmut Rosa

 

Vendredi 28 janvier

Idée de tours de synthèse :

- de quelle.s habileté.s de pensée je me souviens ?

- de quelle.s habileté.s de pensée je me suis servi.e aujourd’hui dans la discussion ? (afficher les habiletés)

- quelle.s attitude.s favorable à la communauté de recherche ai-je eu aujourd’hui ?

- quelle habileté de pensée me semble la plus difficile à utiliser pour l’instant ?

- quelle.s attitude.s j’utilise le moins en CRP ?

 

Lundi 1erfévrier

Après les 2 séances d’aujourd’hui, à 1 séance de la transformation du parcours en création de récits personnels, je dis à Emmanuel et à Mélanie – et cela me semble couler de source – que je me pose la question de changer la suite. Les jeunes sont à 2 doigts de mordre à l’hameçon de la philo et ce serait dommage de quitter les cercles dans lesquels les idées commencent à bien circuler! C’est peut-être le bon moment pour enclencher la boîte à questions et les rôles ? Ça me semble beaucoup plus juste, plus… naturel. Je pense rythme, tempo et aussi ressenti personnel et tout à coup, je réalise que tempo et ressenti sont intimement liés. On dit d’un musicien qu’il joue « avec ses tripes ». Le temps serait-il alors plus un tempo ressenti intérieurement, et donc aussi unique pour chaque humain que ses empreintes digitales ? De la même manière, un groupe aurait-il un tempo bien à lui qui se créerait par l’assemblage des présences ? Une forme d’intelligence collective pré-consciente et que l’animateur se doit de repérer, « flairer », pour un « guidage » subtil et délicat ? J’ai pris il y a 2 ans quelques cours de cheval, non pas pour monter mais pour faire ce qu’on appelle du « travail à pied ». il s’agit de guider le cheval en mimant que nous tenons une corde accrochée à son encolure. La corde est imaginaire mais les gestes précis et intentionnels que nous faisons semble donner au cheval l’impression que nous somme reliés. Il semble « sentir » la guidance. Drôle de sensation qui me revient, et dont je ne sais pas encore que faire.

 

 

Note d’écoute de la séance G2 du lundi 1erfévrier : gestion du temps=gestion du programme de la séance (retranscrire ma présentation)

En écoutant ce début de séance (intro puis intro de la pratique de l’attention), je me dis que la manière dont je choisis d’orienter ce début de séance est fonction de 1) ce qui s’est passé avec le groupe précédent 2) mon « tempo intérieur » 3) le tempo que je perçois du groupe 

> dans cette 2ème séance qui s'enchaîne à la 1ère, j’apprécie la clarté des mots que j’utilise pour présenter le but de la pratique de l’attention. Cette clarté est rendue possible par le tâtonnement avec le G1, la remise en question de ce qui a manqué de justesse et le réajustement avec le G2. Je sens que j’essaie d’être au plus près du présent de chacun et du groupe, de m’ajuster à ce présent pour pouvoir capter ce qui va « coller » avec leurs besoins du moment. Beaucoup de subjectivité probablement, mais une vraie tentative d’objectivation grâce aux questions que je leur pose.

> les mots que j’utilise s’affinent, les phrases, comme des flèches tirées, se précisent. Ma pensée s’affine et se précise en revenant sur le sujet, par l’approfondissement de l’expérience vécue une 2èmefois. Ce cheminement me rappelle le travail de l’acteur, qui affine le rôle, le précise, rentre de plus en plus profondement dans la matière « intérieure » du texte et de son rapport à celui-ci. Voir ce processus à l’oeuvre en moi me conforte dans la confiance que c’est un processus valide chez tout les êtres humains, petits et grands, à des degrés différents. Est-ce si loin de mon sujet sur la gestion du temps ? Je crois que non car c’est le temps pris pour cette recherche intime qui permet au processus de se déployer. Donc, j’en reviens encore à : gérer mon temps, c’est faire des choix et les assumer, comme un écrivain assume la direction de son récit. Se croire victime du temps qui passe, c’est faire l’erreur de croire que nous n’avons pas le pouvoir de décider à chaque instant du cours de notre existence. Et qu’est-ce qu’un atelier philo dans ma vie, si ce n’est une section de temps définie, prise entre avant et après, mais faisant intégralement partie de ma vie telle qu’elle se déroule. Il ne s’agit ni d’une parenthèse, ni d’un pas de côté fait sur le chemin de mon existence. Il s’agit d’une manière de colorer temporairement mon cheminement personnel, faisant pour 1 heure coïncider ma route avec celles de 15 autres personnes…

C’est étonnant comme cheminement spatial et dimension temporelle sont complètement imbriqués dans mon esprit.

 

Mercredi 3 février

Mélanie et Emmanuel me confirment qu’ils ont soumis à l’équipe éducative leur souhait d’un projet sur le collège entier pour l’année prochaine J

 

Vendredi 5 février – zoom avec Caroline R. – à propos du DU ANIMATION D’ATELIERS PHILO

Un animateur fait des choix et se doit de les assumer.

Notre mémoire se fait dans un cadre précis, en l’occurrence pour Caroline et moi, avec les adolescents. C’est un public particulier, qui a ses fonctionnements propres. Comment on fait de la philosophie avec des adolescents ? le collège c’est un peu le no man’s land.

 

Partie théorique

Partie pratique

 

 

Bibliographie envisagée

Hartmut Rosa

Gilles Vernet

Les Cahiers Pédagogiques

Philomag sur l’existence et le temps

Diotime et Cairn

 

Vendredi 12 mars

- je souhaite parler du temps qu’il faut pour que les apprentissages se fassent (pour moi comme pour les jeunes)

- de la gestion du temps, qui s’équilibre entre cadre ritualisé, contenu préparé et adaptation/improvisation sur le moment

 

- du moment présent de l’atelier : préparation/adaptation

- du temps qui doit s’inscrire dans la durée pour que ça chemine : objectifs/confiance dans le processus