COLLÈGE GLANUM - ST RÉMY DE PROVENCE - janvier 2020

NOTES ATELIERS PHILO

COLLÈGE GLANUM

janvier 2020

(ST REMY DE PROVENCE)

Après le spectacle "Black Boy" à l'Alpilium de Saint-Rémy

avec 2 classes de 4ème et 3 professeurs

 

ATELIER 1  - lundi 6 janvier - 1ère classe

 

Tour des prénoms en cercle : ça a pris plus de temps que je ne pensais…

J’ai présenté succintement ce qu’est la philosophie. Mais est-ce nécessaire sur un atelier de ce type*?

En synthèse, je dirais que, nous les adultes, avons globalement beaucoup d’attentes envers ces jeunes. Du coup, on est forcément déçus…

Sentant le peu d’énergie de la séance, j’ai improvisé un débat mouvant, mais mes questions n’étaient pas très inspirées…

Il semble que les jeunes n’aient pas bien compris la question de départ : qu’est-ce qu’un spectacle vivant apporte à un livre ?

Pas assez précis.

Constat : le tour de parole empêche de rectifier le tir en cas de déviation…

Globalement, j’ai prévu trop d’activité, as usual… cela fait partie des attentes nombreuses que l’on se met. On veut tellement bien faire !

Bref, une séance mitigée pour tout le monde.

Un des professeur était frustré mais un autre nous a dit qu’on semait des petites graines, sans forcément voir les plantes pousser…

 

Du coup, j’ai passé 2 heures à revoir la séance du lendemain prévue avec l’autre classe. Complètement déboussolée par cet « échec ».

J’en profite pour analyser ce que signifie pour moi ce sentiment d’échec, ce que je ressens et à quoi ça me ramène…

Grosse réflexion, suivie d'une remise en route de la confiance, recherche d'un équilibre entre « tout nul » et « tout

génial »…

À vrai dire, je crains d’être jugée par les professeurs comme une mauvaise animatrice… 

Je trouve sur le papier un équilibre qui me semble meilleur pour la séance du lendemain. Je dégraisse un peu ! Il s’avèrera qu’il y en avait encore trop !!

 

* il s'agit d'un atelier animé au collège avec en support un spectacle vu par la classe quelques jours auparavant. Ils auront 2 séances en tout. 

 

ATELIER 2  – mardi 7 janvier - 2ème classe

 

Que dire en premier ? un atelier… génial :)

Le premier de ma « carrière » aussi réussi et stupéfiant du point de vue des interventions des élèves. Ils nous bluffent dès le début et vont rapidement en profondeur. 

Je décide au dernier instant de ne pas faire les partages en binômes et d’aller directement sur le débat mouvant. Bonne inspiration et merci à mon expérience d’improvisation :)

Le débat mouvant – avec des questions bien préparées – est un succès. Il dynamise et ils sont nombreux à vouloir s’exprimer. Et, encore plus dingue, ils s’écoutent et rebondissent sur les pensées de leurs camarades !

Les 4 adultes ont de la lumière plein les yeux et assistent à un virvoltage de réflexions et de ressentis, tellement inattendus d’une classe de 30 jeunes de 13 ans !

Un constat évident et personnel : toute remise en question et acceptation des erreurs (errances) amènent à la réussite. Ça ouvre des portes non visibles au départ.

  • Dans le débat mouvant, on parle d’aimer la lecture, de se faire des films dans la tête, des spectacles qui sont forcément différents de ce qu’on avait imaginé dans le livre, de la facilité à comprendre grâce au spectacle ou au contraire de la liberté d’imagination quand on lit.
  • Un jeune me pose la question suivante : quand on pense « bien fait » envers un personnage qu’on aime pas trop, est-ce que c’est une émotion ? je propose au groupe de donner ses propres réponses: "oui, c'est de la colère !"
  • La question philo qui suit est celle-ci : pourquoi les Hommes ont-ils besoin des histoires ?
    • Voici leurs réponses : Pour se divertir, pour échapper à leurs vies, pour vivre par procuration des choses qu’on ne peut pas faire soi-même, pour apprendre des choses, pour réfléchir sur soi, sur la vie, pour changer d’angle de vue sur le monde.

 

Le groupe était tellement présent et impliqué que j’ai proposé à deux jeunes de prendre successivement le rôle du distributeur de parole. Ça a très bien marché ! Comme quoi, il n’y a pas de règles. Cela dépend de la « personnalité » du groupe et de la capacité de l’animateur à improviser en fonction. Que de l’humain !

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ATELIER 3  – lundi 20 janvier 


Ce 2èmerendez-vous me conforte dans l’idée que chaque groupe a une « personnalité » propre. Ici, un gros manque de confiance les uns envers les autres semble prédominer…

Je ne me suis pas sentie perdue cette fois-ci. Par contre, les nombreux silences ont pu déranger certains participants.

Au démarrage, une jeune fille a tenu tête à un des professeurs car elle ne voulait pas s’asseoir près d’un garçon. Le professeur a dit qu’elle noterait une remarque dans son carnet.

Ensuite, il a fallu commencer...

J’ai voulu inclure cet événement dans ce cercle du "Vivre Ensemble". J’ai donc commencé par remarquer qu’il n’était pas facile de s’entendre à 30 pour former un cercle et que les adultes avaient dû poser des règles. J’ai demandé aux jeunes si ces règles leur paraissaient trop strictes, ou bien nécessaires, importantes ? Quelques timides réponses à main levée. 

Je me demande comment faire évoluer la confiance au sein de ce groupe...

Ensuite, j’ai enchaîné sur le jeu du décompte qui se passe plutôt bien, mais je me demande s'ils sont attentifs ou sages comme des images...

Tout en écrivant, je réalise qu’un tel atelier implique pour les professeurs présents une capacité à se décaler de leur posture habituelle. L'un deux m’a dit à la fin de cette séance qu’il avait sermonné la classe avant l’atelier pour qu’ils soient plus polis que la première fois.

Je comprends son besoin que l’intervenante soit respectée mais il faut que je sois vigilante à clarifier ma place sur la gestion du cadre.

Par exemple, à la fin de la 1èreséance, j'aurais pu lui dire que je régulerais moi-même le cadre en début de séance suivante. 

Puis, le débat mouvant a permis de faire circuler un peu l’énergie. Plutôt dynamique avec quelques prises de paroles.
Après le débat en mouvement, on s’est remis en cercle et j’ai proposé de revenir sur une des questions qui avait fait réagir la classe : que pensez-vous de la phrase « l’enfer, c’est les autres » ?

Ce retour au cercle a ramené l’énergie à son niveau minimum de circulation. 7 jeunes maximum ont pris la parole. Beaucoup de silences.

J’ai tenté plusieurs relances, faisant mon possible pour être à l'écoute...

Un professeur a évoqué à la fin qu’il aurait fallu relancer sur des sujets qui concernent plus les jeunes de leur âge mais qu’elle n’avait pas eu d’idée. 

Deux professeurs trouvaient qu’on s’était un peu perdus en chemin. 

Pour le 3ème professeur et moi, il y avait un lien évident entre « l’enfer, c’est les autres » et le sujet de la fin : est-ce difficile d’avoir confiance en l’autre ?

Bref, encore beaucoup d’attentes chez les adultes et un cadre qui demande sûrement à être plus sécurisant pour chacun.

Je termine avec le sentiment que demain, ça va être « facile » et que c’est sur l’atelier d’aujourd’hui que l’enjeu était le plus grand. Demain, on va s’extasier qu’ils sont formidables et tant mieux ! Mais a-t-on donné à ceux d'aujourd’hui toutes les possibilités d’être formidables ?

Je note également que lors de la séance de demain, je dois faire plus précisément le lien avec la 1èreséance. Ce lien a peut-être manqué aujourd’hui …

 

ATELIER 4  – mardi 21 janvier 

 

C’était formidable et je ne me suis finalement pas sentie blasée :)

Dans cette classe, l’énergie circule globalement et la confiance aussi. Ça a d’ailleurs été le sujet du cercle : peut-on éviter les jugements et en quoi consiste un jugement : évaluation factuelle ou critique malveillante ?

Je me suis mis pas mal de pression pour cet atelier et j’étais assez déstabilisée au départ. J'ai mis un temps à me détendre, mais en leur disant que "j'étais un peu stressée aujourd'hui", mon stress a commencé à redescendre.

En tentant d’expliquer le jeu du décompte, je me suis emberlificotée, disant que la digestion m’avait endormi les neurones ! À ce moment, un élève m’a aidé en rappelant que c’était le même jeu qu’avec les prénoms. Merci :)

Ensuite, ça a roulé tout seul, ils ont démarré au quart de tour et il a fallu freiner pour respecter l’horaire de fin !

Les questions de départ portaient, comme hier, sur les questions du « quizz mouvant » :

- pensez-vous que les Hommes vivront un jour en paix sur la planète ?

- pensez-vous que les Hommes seront un jour heureux de vivre tous ensemble ?

- pensez-vous que les Hommes vivront un jour sans peur de l’Autre ?

- êtes-vous d’accord avec cette pensée de JP Sartre: « l’enfer, c’est les autres » ?

 

Pour la première fois, un jeune est venu me remercier de lui donner la possibilité de mieux connaître ceux de sa classe et ses profs. 

Il a témoigné en cercle qu’il aimerait que ça se passe comme ça plus souvent… :)

Les  professeurs ont pris acte et je vois à quel point ça chemine pour elles trois !

Quelle joie de voir que tout ça déclenche d’autres relations, et même assez rapidement !

Il faut dire que le thème du cercle y a sans doute contribué : peut-on parler à cœur ouvert et être authentique en société ? 

Superbe sujet que je tenterai de reprendre avec d’autres !

 

Pour finir, ils ont eu l’air déçus que les ateliers s’arrêtent déjà et ont souhaité s’applaudir. Quelle énergie !